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Les souvenirs et ce qu’ils ont à voir avec l’image de la destination

À la fin d’une visite, la boutique de souvenirs nous propose de prolonger le voyage le temps d’une emplette. On rapporte alors un petit bout du rêve chez soi, pour soi. Ou bien on l’offre aux malchanceux qui n’ont pas pu nous accompagner. Set de table, mug, magnet, porte clef, tire bouchons… Nous avons tous craqué pour un de ces bibelots, que l’on ramène des vacances. Ils prennent la poussière sur nos étagères, sans qu’on y fasse plus vraiment attention.

Et puis un jour, on retombe dessus, en rangeant les cartons ou en fouillant derrière un meuble. Et on se demande : pourquoi diable l’avoir acheté ? Qu’est-ce qui m’a pris d’avoir ramené cette bricole inutile ? Toutefois, impossible de se résigner à le jeter, puisque qu’il nous rappelle de vieux souvenirs de vacances ! Côté professionnels du tourisme, posons-nous la question également. En quoi la ligne de souvenirs vendus impacte-t-elle l’image de la destination ?

Les souvenirs… part entière de l’offre touristique

Véritables témoins du voyage, les souvenirs nous renvoient soit au séjour que nous avons nous- même effectué, soit à la personne qui nous l’a offerte. Dans tous les cas, ils représentent la volonté de sauvegarder le souvenir du séjour, fugace par nature. Le souvenir peut également être un trophée, une sorte de vitrine de nos différents voyages. On le montre à nos amis, à nos collègues, nos familles. Ils sont vecteurs de discussion et de partage. Ils peuvent même motiver de futurs départs chez les personnes n’ayant pas eu la chance d’y aller. 

Qu’ils soient insolites, ringards, kitch, ou identitaires, l’offre des souvenirs est large et leur format divers et varié. Boutiques de prêt-à porter, boutique artisanale, boutique de créateurs, ateliers de métiers d’arts, librairies-boutiques de musées sans oublier les boutiques de spécialités culinaires. Tous proposent des produits typiques et participent ainsi à la diffusion de l’identité de la destination.

© India TV

Les souvenirs comme outil marketing 

Pour les visiteurs, le souvenir est un témoin de leur séjour, mais aussi un moyen de partager leurs expériences de voyage auprès de leurs pairs. Ce partage constitue alors une source d’inspiration pour les futurs choix de destination de ces pairs. Il y a donc un réel potentiel à exploiter en termes de stratégie marketing pour les destinations. 

Ainsi, les destinations cherchent à créer des souvenirs plus personnalisés, davantage représentatifs de la région. Mais surtout, ils doivent raconter l’histoire de la destination. 

Pour cela, l’objet souvenir doit être réfléchi et doit répondre à un certain nombre de questions.

  1. Que souhaite-t-on représenter ? une destination, un lieu, un monument, un élément du paysage, un fait historique ?
  2. Que voulons-nous raconter ? une anecdote, un mythe, une légende ?
  3. Quelles valeurs doit-il partager ? la tradition, modernité, l’innovation, l’originalité ?
  4. À qui le souvenir s’adresse-t-il ? Aux touristes ou aux locaux ? Aux jeunes, moins jeunes, familles, couples ? A des touristes expérimentés, néophytes, culturels, d’aventure ?
  5. Qui vendra ces produits ? les offices de tourisme, les sites touristiques ou les sites culturels, les commerces de proximité ?… 

Le souvenir est une campagne promotionnelle à part entière. Le média de diffusion en est le client. Par le bouche à oreille, par leur récit de voyage, ils vont communiquer autour de la destination sans en avoir pleinement conscience. L’avantage pour la destination est double. La vente de ces souvenirs complète les ressources de la structure touristique. Elle permet également la valorisation des artistes et producteurs locaux. De plus, par la vente de ces souvenirs, la destination contrôle l’image qu’elle souhaite diffuser. 

Les produits locaux : véritables fers de lance de la destination 

Même si les mugs, les t-shirts, les dés à coudre et les porte-clefs se vendent toujours aussi bien, le problème c’est que bien souvent, la moitié des stocks sont fabriqués hors de nos frontières… Dans l’Hexagone, la demande pour le « made in France » est grandissante. Elle est synonyme de qualité, et les boutiques de souvenirs l’ont bien compris. Au placard donc, tous les produits venus d’Asie. Place aux produits locaux ! 

Les boutiques des offices de tourisme ou de sites touristiques n’hésitent plus à faire appel aux artisans du coin ou aux producteurs du territoire. 100% identitaire, ces produits sont achetés par des visiteurs, mais également par les habitants qui souhaitent consommer local. Car pourquoi donc essayer d’aller chercher loin des produits que l’on peut trouver au coin de la rue ?! 

Brive : une ville 100% gaillarde ! 

Les marques locales ont le vent en poupe depuis quelques années. Les villes comme Reims ou Saint Etienne ont lancé leurs marques « Je suis Rémois » ou « La petite Stéphanoise » et ont rapidement vu leurs ventes augmenter. Même à Bordeaux, son expression phare, « Gavé bien » se vend comme une marque et cartonne auprès des habitants comme des visiteurs. En effet, toutes ces marques ont su trouver un public auprès des visiteurs comme pour les locaux. Elles apparaissent comme des symboles forts d’identité. Elles créent un sentiment d’appartenance, à la fois pour les locaux, mais également pour les visiteurs, qui peuvent revendiquer leur appartenance à ce groupe. Ils se sentent eux aussi comme les locaux. 

Icone de chargement du site de Brive Tourisme

Brive-La-Gaillarde, en Corrèze, a mis en lumière sa gaillardise pour créer bien plus qu’une marque… C’est désormais un vrai mode de vie ! Créée en 2009 par l’office de tourisme, la marque « 100% gaillard » a une identité simple. Elle s’inspire de la célèbre marque new-yorkaise avec des t-shirts « I love BG ». Tellement de destinations jouent sur cette marque que s’en est presque ennuyant ! Mais un an plus tard, Brive adopte la moustache comme symbole emblématique de la ville. Dans sa lancée, la moustache décalée et totalement gaillarde a le droit à sa première collection de produits dérivés. Forte de son succès, une boutique dédiée à la marque voit le jour à la fin de l’année 2014. Depuis, la marque s’épanouit et les collections se succèdent. La moustache ne s’arrête plus ! 

Adopté par les locaux et apprécié des visiteurs, l’office de tourisme a réussi son pari ! Son succès fait de la marque un exemple pour d’autres sites touristiques. Le phénomène est d’ailleurs mentionné dans plusieurs sites de veille touristique. Même de l’autre côté de l’Atlantique, les Québécois parlent de Brive ! La ligne de souvenirs créée par la ville a donné une identité propre à la ville puisque la moustache est devenue un symbole fort et reconnus de tous.

Faut-il assumer ou refouler les clichés de nos destinations ? 

Les clichés ne seraient-ils pas après tous des symboles forts de nos destinations ? Éléments caricaturaux et généralisateurs d’une région et souvent perçu de façon négative, les clichés peuvent pourtant faire partie d’une stratégie de communication efficace, s’ils sont bien travaillés.

C’est ce qu’a fait la Suisse, qui a publié une série de vidéos de promotion. Elle met en scène Sébi et Paul, deux bonshommes sortis directement de leur campagne et qui découvrent la grande ville. Ces deux figures franches du terroir suisse sont attachants et l’absurdité de la vidéo nous renvoie une image positive de la ville.

Deux éléments très importants sont ainsi mis en scène. D’un côté les locaux, un brin bon vivant et loin des tendances modernes du XXIe siècle. De l’autre, la ville dynamique et foisonnante de modernité. Cette campagne de publicité est inédite. Elle propose quelque chose de foncièrement différent tout en montrant la destination telle qu’elle est. Le côté décalé et humoristique fonctionne et marque les esprits. Les utilisateurs ont envie de partager cette vidéo autour d’eux. Ils créent ainsi un plus grand nombre d’opportunités de visite dans le futur.

Les clichés existent malgré tout, et les assumer, ce n’est pas une idée si bête ! Avant de venir sur un territoire, les visiteurs en ont souvent une image préconçue. Et cette image-là est bien souvent constituée exclusivement de clichés ! Ne pas leur servir ce qu’ils s’attendent à voir pourrait être même décevant pour certains de ces visiteurs. En effet, si un jour je vais en Bretagne, je vais m’attendre à avoir de la pluie et à croiser au moins un ou deux Bretons dans leurs cirés jaunes ! De même que si je vais en Belgique, je ne pourrais pas dire que je suis allée en Belgique avant d’avoir goûté aux frites et à la bière belge. Bref, les clichés sont là, alors utilisons-les !

Et s’ils sont trop négatifs, rien n’empêche de les rendre plus glamour et d’en être fière (comme c’est le cas des habitants de la ville de Charleroi, qui assument de vivre dans “la ville la plus moche du monde”, citée dans cet article). Finalement, il n’y a pas de mauvais cliché, juste une mauvaise communication ! 

Le bon conseil ?

Aujourd’hui, les touristes et les visiteurs veulent de l’authenticité, faire des rencontres avec les locaux et vivre des expériences uniques. Et si mettre en avant ce qu’est vraiment notre territoire n’était-elle pas la solution ? Les managers des destinations cherchent souvent à proposer des choses à l’opposé de l’identité de cette dernière, plutôt qu’à innover et à proposer finalement des produits en totale adéquation avec leur réelle identité. Je pense notamment à cette campagne de promotion de l’Alsace qui a fait grand bruit, à retrouver ici.

Servez à vos visiteurs ce qui est propre à votre destination, mettez en avant vos produits et ne reniez pas vos clichés, car tout cela représente votre identité. De plus, rendez fiers vos habitants, puisque les habitants sont les meilleurs ambassadeurs de votre territoire. Si les locaux aiment leur destination, alors vos visiteurs l’aimeront aussi ! 

Article réalisé pour un travail de veille que vous pouvez retrouver ici Par Carol-Anne Gicquel, dans le cadre du Master 1 AGEST promotion 31. IATU Université Bordeaux Montaigne Février 2019

Aller plus loin…

Téléchargez la note de veille réalisée par Carol-Anne Gicquel, étudiante AGEST, dans le cadre de son master à l’Université Bordeaux Montaigne

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